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L'article suivant a été publié pour la première fois dans Up the Gatineau! Volume 50.
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Une cuisinière de chantier: Yvette Saumure Bénard
Par Louise Schwartz
Le mystère est résolu : il s’agit d’Yvette Saumure Bénard. Avec une jante lui servant de cloche, elle appelle au repas les bûcherons d’un camp forestier du Québec.
Sa photo est l’une des centaines de milliers prises par le réputé photographe Malak Karsh. Connu professionnellement comme « Malak », très tôt il travailla comme relationniste sous contrat pour l’Association canadienne des pâtes et papiers. En 2020, cette photo et une douzaine d’autres parurent dans le volume 46 de la revue Up the Gatineau! Elles avaient toutes été prises par Malak lors de ses photoreportages dans les camps forestiers du Québec à la fin des années 40. À l’époque, nous ignorions qui était cette cuisinière.
En 2023, la photo apparut sur une page locale de Facebook, « Il était une fois une vallée du Nord”, et c’est ainsi qu’on apprit qu’elle s’appelait Yvette Saumure Bénard. Aussi, il nous semble important de le reconnaître, avec une reproduction de sa photo.
Ils ont été nombreux à commenter le texte de Facebook, soit que c’était une parente, soit qu’ils en avaient entendu parler. Elle était admirée, et bien aimée, comme en témoignent ces commentaires : « tellement gentille cette dame », « impossible d’oublier Mme Yvette Saumure… Je l’ai adorée cette dame ».
J’ai eu beau lancer un appel sur Facebook et faire des recherches sur la vie d’Yvette, je n’ai pas trouvé grand-chose. Née le 31 juillet 1919, dernière d’une famille de 14, elle a vécu à Maniwaki. Elle a eu une longue vie, décédée le 5 octobre 2018, à neuf mois d’être centenaire. Elle était mariée à Aldé Bénard (1910-1992), qui était lui-même chef à l’auberge de Maniwaki. Il semble qu’ils n’aient pas eu d’enfants.
Au printemps de 1949, lorsque Malak prit sa photo, Yvette devait approcher les 30 ans et était sans doute mariée. Dans l’ambiance masculine d’un chantier, les femmes étaient rares, et la cuisine était probablement le seul endroit où elles pouvaient travailler. Entourée de centaines d’hommes, dans des conditions de travail difficiles, une femme seule devait avoir du caractère et être plutôt coriace. Le travail n’était pas dépourvu d’épreuves, comme les longues absences loin de son mari, mais ça lui apportait peut-être aussi un sentiment de liberté.
Yvette aurait sûrement eu bien des choses fascinantes à nous dire au sujet de sa vie de cuisinière de chantier. C’est un rappel à nous tous, qu’il faut chercher et documenter les souvenirs de nos aînés avant qu’il ne soit trop tard.